Durant les dernières années, l’Institut National de la Statistique tunisien (Statistiques Tunisie) a engagé des travaux ambitieux de remise à niveau du Système de Comptabilité Nationale tunisien (SCNT) mis en œuvre dans les années quatre-vingt. Dans le vocabulaire des comptables nationaux, ces travaux sont traduits par le terme de « rebasage » ou de « changement de l’année de base » des comptes. Cette opération a abouti à l’élaboration de la troisième génération des comptes nationaux tunisiens, succédant à celles de 1983 et de 1997.
En fait, plusieurs motivations poussent à rénover périodiquement les systèmes de comptabilité nationale. Les comptes nationaux doivent donner une description de la réalité économique la plus fidèle et la plus complète ou exhaustive possible. Cette réalité économique étant en perpétuel changement, en particulier avec le contexte économique et social ayant prévalu en Tunisie durant la dernière décennie, il fallait donc traduire ces mutations dans le chiffrage économique en adoptant une année de référence plus proche pour l’élaboration des comptes. En outre, idéalement, les comptes nationaux se doivent d’être conformes aux normes internationales les plus récentes. Ainsi, les nouveaux comptes nationaux tunisiens en base 2015 sont désormais établis selon le dernier Système de Comptabilité Nationale SCN 2008. Le précédent changement en base 1997 avait donné lieu, déjà, à des révisions importantes des concepts utilisés, en adoptant le Système de Comptabilité Nationale SCN 1993, qui était le standard à vocation universelle dans le domaine et dont l’application par tous les pays devait surtout rendre plus significatives les comparaisons internationales.
Par ailleurs, le basculement d’une base à l’autre induit généralement des changements qui portent, en plus des concepts, sur les nomenclatures, les sources et les méthodes. En effet, lors des changements de base, on réalise ponctuellement des investigations statistiques exceptionnelles qui, en raison de leur coût, ne peuvent être reproduites chaque année. Cela conduit à réviser certains niveaux, certaines clés de répartition, certains taux. Tous ces éléments sont ensuite tenus pour fixes jusqu’à la base suivante. Mais l’évolution dans le temps des données tenues pour fixes conduit à des comptes de moins en moins précis car de moins en moins spontanément cohérents. D’où la nécessité d’une révision fréquente et régulière de la base d’élaboration des comptes nationaux.
Lorsque Statistiques Tunisie procède à un changement d’année de base, de nouvelles estimations sont publiées pour le passé. S'il n'y avait pas de changement de méthodologie ou d'utilisation de nouvelles sources statistiques, les évaluations des comptes en valeur, comme les estimations des comptes en volume au prix de l'année précédente, ne seraient théoriquement pas modifiées. Les changements porteraient alors seulement sur les évaluations des comptes en volume, aux prix de l'année de base. Mais, en pratique, des modifications sont opérées dans l'élaboration des comptes et changent quelque peu les estimations en valeur et en volume au prix de l'année précédente, suite aux lourds travaux statistiques entrepris pour l'année qui sert de référence (exploitation d'enquêtes spécifiques ou de recensements, application de techniques d’estimation plus élaborées). D’ailleurs, le passage de la base 1997 à la base 2015 se caractérise par peu de changements conceptuels, par le quasi maintien des nomenclatures, mais davantage par un effort particulier pour améliorer les méthodes d’évaluation.